Décidément, le président de la République François Hollande n’entend rien et ne comprend rien. Les élections européennes ont délivré un message très fort aux pouvoirs publics : un ras-le-bol généralisé des électeurs, qui ne croient plus en leurs élus, s’abstiennent ou se tournent vers un vote extrême par dépit. 15 jours après, le président annonce une réforme qui va accentuer ce mouvement ! Explications.
Comment lutter contre la montée du Front national ? L’UMP a testé pour cela la « ligne Buisson » : être « décomplexé », prendre les mêmes thèmes que l’extrême-droite, et ne parler plus que de cela, insécurité, immigration, identité nationale, pains au chocolat… Le résultat est sans appel : c’est un échec, les gens préférant l’original à la copie. Ce type d’attitude légitime les thèses du Front National, et le renforce dans l’opinion, tout en faisant fuir un électorat modéré qui ne s’y retrouve plus.
Alors quel est le remède ? Il est connu et part d’un constat simple. Il faut que les élus fassent leur travail de présence sur le terrain, au plus proche de la population. Lorsque les élections arrivent et que les gens sont tentés par un vote « ras-le-bol » ou « tous pourris », ils révisent leur jugement en disant « oui mais celui-là on le connait » « il est là tout le temps, même après les élections » « il est honnête et sympa » « on peut discuter avec lui » « on peut avoir besoin de son aide »… Ils révisent alors leur jugement sur la classe politique et font un vote pour des personnalités locales.
Prenons l’exemple des municipales (élection de proximité) : à Belfort le Front National fait 10 % le 30 mars 2014 et… 23% le 25 mai 2014 aux Européennes, élection plus lointaine !!!
Lorsque les élections cantonales (autre élection de proximité) se déroulent en même temps que les régionales (plus lointaines dans l’esprit des gens), une partie des électeurs vote pour les premières, et pas pour les secondes. Une partie encore vote pour des personnes qu’elles connaissent aux cantonales, et se défoulent en votant extrême droite aux régionales.
La proximité est donc un des remèdes pour lutter contre la montée de l’extrémisme.
Et que fait François Hollande ? Absolument le contraire :
- Il supprime l’échelon de proximité que représente le conseiller général ancré sur un territoire à taille humaine. L’implantation locale est aujourd’hui l’un des points faibles de l’extrême-droite.
- Il crée des « supers-régions » où siégeront des élus encore plus éloignés des gens… Idéal pour revivre les résultats des Européennes !! Avec le risque cette fois de donner les clés de ces supers régions aux extrémistes !!!
- Il conforte le scrutin de liste, qui fait la part belle aux partis, et pas aux citoyens (le petit maire rural qui décide de se présenter seul pour défendre un terroir, c’est fini)
Cette réforme est donc un non-sens : elle sera inefficace et extrêmement dangereuse pour notre démocratie car elle accentuera le fossé entre la classe politique et la population.
De plus, elle ne signifiera pas la fin des gaspillages : je vois déjà la construction de nouveaux « supers hôtels de grandes Régions », des frais de fonctionnement qui augmentent (déplacements, chargés de coordination départementaux ou sectoriels…)
C’est aussi un net recul de la décentralisation. Car après-demain, on supprimera ces « grandes régions » en prétextant des mesures d’économie, et tout sera à nouveau centralisé à Paris, comme dans les années 1960 !! Le Jacobinisme a de beaux jours devant lui !
Il faut tout faire pour que cette réforme ne passe pas, et cela en rassemblant au-delà de tous les clivages politiques traditionnels (il y a des opposants tant à droite, qu’à gauche ou au centre).
Je préconise une autre solution pour simplifier le millefeuille territorial.
1/ conservons nos régions actuelles, avec quelques exceptions basées sur des volontariats (fusionner Basse et Haute Normandie par exemple, cela a du sens).
2/ supprimons la plupart des sous-préfectures.
3/ supprimons les Conseils généraux, en transférant leurs importantes compétences – et leur personnel – aux Conseils régionaux.
4/ élisons les Conseillers régionaux non plus sur un scrutin de liste, mais individuellement sur un territoire (proche du canton). Et gardons une petite dose de proportionnelle pour permettre à toutes les sensibilités d’être représentées.
Ces points sont évidemment à débattre. Pas question pour moi de chercher à les imposer. J’aimerais que l’Etat soit dans cette même disposition d’esprit. Hélas, ce n’est pas le cas.
Les nouvelles "Super-Régions" telles que proposées par le Président de la République.
Excellente proposition.
Rédigé par : JCP | 04 juin 2014 à 15:00